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Des cris déchirent le silence

Des cris déchirent le silence

Film de Natacha Thiéry - France

Un activisme inédit se déploie sur les murs par des collages au code graphique identique, saisis en quatre années de luttes féministes et antifascistes (fin 2019-fin 2023). Gestes politiques, individuels et collectifs, cris de révolte contre le patriarcat systémique et le capitalisme, en réponse à la silenciation des violences, ils modifient à vue l’espace public urbain autant que les subjectivités. Faire effraction, (re)prendre la rue, rendre visible, dans une société de plus en plus violemment clivée, ce qui ne l’était pas. Ici et ailleurs, tant qu’il le faudra.
Rencontre avec Natacha Thiéry
Sam. 30/11 2024 à 14:00
En partenariat avec l'Antenne Jeune d'Amnesty Toulouse
Natacha Thiéry : Les images se confondent avec ma mémoire. La nécessité de garder une trace de ce qui m’émeut ou me révolte est souvent à l’origine de mes projets, qui prennent la forme d’essais documentaires. Née à Paris, j’ai passionnément pratiqué la photographie (argentique, puis numérique). Après des études de cinéma et de littérature, j’ai assouvi mon désir de cinéma grâce à la Super-8 puis aux petites caméras numériques. Je cherche, par l’attention au sensible souvent inattendu que peut offrir le réel, des possibilités de nouer pratique du cinéma documentaire et résistance à la violence (dans ses formes multiples), la disparition ou l’oubli. Parallèlement, je partage ma passion du cinéma à l’université des Arts d’Amiens, en tant qu’enseignante en esthétique du cinéma et analyse de films : identifier la singularité de leur forme, ce qu’ils déplacent en nous est l’une de nos visées. Des cris déchirent le silence est mon deuxième moyen-métrage, après Rêve de Gotokuji par un premier mai sans lune (2020), sélectionné à Cinéma du Réel 2021 dans la section « Front(s) populaire(s) », et trois courts-métrages. Le film a été sélectionné au Festival Cinéma du Réel 2024. 

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Un tourbillon de sens et d'émotions qui fait écho à notre histoire contemporaine

Le film récolte les collages féministes et antifascistes inscrits sur les murs de Paris et de villes proches (comme Montreuil) entre fin 2019 et fin 2023. Véritables cris lancés le plus souvent dans la nuit par des colleureuses, ces écrits font écho aux combats des femmes et personnes discriminé.e.s contre les violences qu'elles subissent.
Revendicatives, parfois drôles et souvent déchirantes, ces paroles jetées sur les murs se déclinent en lien avec les actualités et les luttes sociales collectives au cours de ces quatre années récentes, à l’échelle nationale mais aussi internationale.
C'est très émouvant de revenir sur ce que nous avons vécu dans cette période, entre le visible d'une actualité médiatique vertigineuse et la souffrance invisibilisée des personnes auxquelles renvoient ces slogans : ce sont des paroles anonymes et éphémères, ce qui rend leur présence d'autant plus marquante. Car elles sont intelligentes, vivantes, inventives et combatives.
Il faut saluer ce très beau travail de cinéaste qui a patiemment récolté ces écrits voués à disparaître, notamment en raison du fait que certains les détruisent : il existe encore des forces qui refusent que cette parole existe et s'acharnent à la nier, ce qu'indiquent clairement leurs actes d'effacement.
Ainsi, Des cris déchirent le silence se construit très intelligemment sur une série de tensions rendues sensibles dans la combinaison entre images et sons.
C'est un travail cinématographique sur la fixité et le mouvement : la permanence de questions immémoriales liées aux violences sexistes et sexuelles et le flux de l'actualité sont conjointement inscrits dans les images et le sens des slogans. Mais cette dialectique est encore renforcée par une autre exploration, sur le plan de la bande sonore, qui alterne différents régimes dans une poétique sonore construite en lien ou par opposition avec l'image.
Un autre parti pris de la cinéaste consiste à ne pas proposer de commentaire explicatif de ce que l'on voit : on ne peut que la remercier, car ce choix convoque les images et les sons dans toute leur force et redonne au cinéma son aura d'art à part entière.
Pour toutes ces raisons, on ne peut que recommander ce film qui a une dimension historique tant par le phénomène des collages que des thématiques qu'il convoque. Le sens du montage a quelque chose de vertigineux et d'assez inouï sur ce que peut le cinéma, ici compris comme construction en mouvement d'un regard et d'une pensée critique qui fait appel à la participation active du spectateur. 

Pierre-Alexandre Nicaise

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il sera précédé du court métrage : 

Douxce de Lila Steinbach. 14’. France. 2023
Synopsis : Eli et Lou passent leurs derniers instants ensemble avant de se séparer pour de bon. Eli gère à sa manière cette rupture, et fait face à la solitude et ses représentations.
Rencontre avec la réalisatrice

Séances

Vous pouvez réserver votre place  au tarif unique de 7,20€ en cliquant sur le lien de la séance.

  • Sam. 30 Nov. 2024 à 14:00